vendredi 5 février 2010

Hôtel Goodrich.

15/01/2009

- Pendant que Virgil essaie ses gants, Nalya demande au vendeur l'adresse de l'hôtel fréquentable le plus proche et celle d'un salon de coiffure. On lui indique l'hôtel Goodrich. Ils y vont. Cet hôtel est une monstruosité de luxe et de vulgarité aristocratique à tendance nouveaurichitienne. Lorsque, dans le hall (grand, le hall), ils demandent un endroit où loger l'armée (En vrac Nalya, Virgil, Néro, Myllenia, Paola, Kurt, Zacharias, Délano et Laurens), on leur propose des suites cinq étoiles dans les étages les plus élevés. Cinq chambres et deux salles de bain par suite, avec jardin et piscine. Après avoir visité, Nalya paye (élevé, le prix) et prévient par la pensée Paola que ça y est, Hotel Goodrich, sixième étage, le dîner est servi.
- Pendant ce temps, Paola s'achète un sac à dos (parce que merde, quoi, une cantinière, c'est encombrant à la longue) et Laurens fait de même avec son propre salaire. Cependant, après transvasage express, il garde la cantinière sous le bras. Au marché/bazar, chacun fait quelques emplettes, passe-partout, armes, maquillage (Saviez-vous que "maquillage" s'écrit "makijaze" en polonais, [avec normalement un point au-dessus du z] et se prononce exactement de la même manière ? Voilà, c'était pour la minute culturelle.) et galettes-saucisses. Délano, pour sa part, traîne plutôt du côté des antiquaires et des vieilles boutiques poussiéreuses, à la recherche d'on ne sait quoi. Dans l'après-midi, Paola reçoit et transmet le message de Nalya. Elle a également l'occasion de se rendre compte qu'en ville traîne un nauséabond relent de magie mal rasée.
- Après cette séance de shopping décadent, tout le monde converge (et converge, ça fait des bébés... ) vers l'Hôtel indiqué. Une fois que Nalya a terminé de se faire tripoter le cuir chevelu par une dizaine de phalanges embagousées au salon de coiffure local (onéreux, le salon, et pas chié, le coiffeur), elle retourne également à l'hôtel. En fait, avec le décalage temporel, elle arrive à peu près en même temps que les autres. D'aucuns essaient d'avoir l'air blasé devant cette débauche de luxe incommensurable, mais n'y parviennent qu'à moitié. Pudiquement, nous nous répartissons alors dans les deux suites ("pudiquement" parce que, à l'exception de Laurens, on fait pas dans la mixité) et explorons avec avidité l'étendue de notre richesse. Dans chacune des suites, il y a cinq chambres, deux salles de bain et une salle commune (pour bouffer), dans laquelle une bouteille de vin offerte par la maison attend patiemment qu'une âme charitable veuille bien lui faire un sort. On a alors l'occasion de se rendre compte que personne n'a pensé à prévenir Néro et Myllenia. Laurens envoie un groom les prévenir avec un pragmatisme dont beaucoup feraient bien de s'inspirer. Sans plus attendre, Nalya se dépèche alors de monopoliser la première salle de bain, tandis que Paola sert le vin avec une classe casanovienne et emporte son verre et son portefaix dans la seconde salle de bain pour savourer de l'un et de l'autre l'arôme et l'habileté au déduit.
- Dans la seconde suite, ça commence déjà mal quand Kurt fait un scandale (en peignoir) en s'apercevant que l'eau (courante, oui) n'est pas tiède-froide comme le veut l'étiquette, mais bel et bien tiède-chaude. Quelques grooms exaspérés lui apportent des seaux d'eau tiède-froide, mais Virgil (très joueur, Virgil), décide de les aider et de réchauffer l'eau des seaux de quelques dizaines de degrés en montant l'escalier. Voyant arriver son eau fumante, à la limite de l'ébullition, Kurt se saisit de l'un des seaux et asperge le pyromancien hydrophobe d'un gros tas de molécules désolidarisées composées d'éléments divers, tels que l'hydrogène et l'oxygène.
Et là, quelque chose se brise à l'intérieur du cerveau de notre ami.
Virgil hurle, court dans tous les sens sous l'effet de la panique, bouscule rudement un groom, ravage la pièce commune de la première suite et va se réfugier dans un coin, muré dans un délire tri-chromosomique, non sans s'être arraché la chemise et et griffé la peau là où c'est trop humide.
- Avec un profond soupir (las, le soupir), Nalya sort de sa salle de bains en peignoir et tente une approche douce en lançant des illusions psychiques au malade, censées l'inciter au calme. En fouillant dans ses souvenirs, elle retrouve l'origine du traumatisme et se demande s'il serait sage d'appuyer sur le bouton "Delete". Dans le doute, s'abstenir. Paola, Délano, tout le monde finit par arriver, la curiosité placardée à la surface des iris.
- On paye les dégâts. (une baie vitrée, un groom blessé, le papier peint dans un état lamentable...)
- Profitant du fait que Virgil est incapable de faire quoi que ce soit, Kurt commence à fouiller dans ses affaires pour lui voler ce qu'il a de précieux. Il trouve un Katana, un peu d'or, et décide, pétri de malveillance, d'aller mettre tout ce qui ressemble à du tissu au feu. Le Katana à la main, il descend alors l'escalier et aborde un groom en lui agrippant la chemise pour lui demander s'il y a une cheminée dans le coin. Le groom s'énerve et commence assez rapidement à le soupçonner d'être un voleur en peignoir, qui vient de déposséder un client. (sa tête de truand du Dwanhölf aidant) La situation s'embrouille au point que Kurt est ramené à l'étage manu militari et qu'on demande au reste du groupe s'ils connaissent ce type. Paola assure qu'elle gardera un oeil sur lui, demande de la corde à un groom, et Kurt est relâché. Cependant, au lieu de tendre les poignets en la remerciant de sa magnanimité comme un bon chien de Dwanhölfite qu'il est, il s'enfuit et gagne la rue.
- Dans les suites, après cet incident, Virgil récupère lentement ses esprits et tout le monde finit par aller pioncer. Le pyromancien se rend tout de même compte qu'il lui manque quelques affaires et descend dans la rue à la recherche d'une armurerie. Malheureusement, il recule devant les prix surtaxés de Deimos.
- De son côté, Kurt se vêt des fringues qu'il a volé à Virgil, jette le Katana dans une bouche d'égout et va dormir dans un autre hôtel en se payant la chambre avec l'argent qu'il vient de récupérer. (le seul où on l'accepte)
- Le lendemain matin, vers six heures, Néro réveille le groupe parce que "Myllenia est pressée !" et nous annonce que le bateau part très bientôt. Maussades, nous prenons un rapide petit déjeuner et quittons l'hôtel. Kurt nous rejoint par derrière et annonce, alors que personne n'avait remarqué qu'il était là, qu'à partir de maintenant, il va garder en permanence un seau d'eau à la main pour le cas où Virgil dépasse les bornes. Et ça ne rate pas, ce dernier fait une nouvelle crise. C'est moins spectaculaire : il est juste en train de baver, accroupi par terre en se tenant la tête. Alors que Kurt se fait engueuler, Néro se voit prier de porter Virgil sur son dos jusqu'au bateau, après qu'on lui a bandé les yeux pour lui éviter de voir la mer.
- Nous arrivons sur le bateau doucettement (On le reconnaît parce qu'il y a un type en noir avec une faux sur le dos qui pose pour un magazine à l'avant) et prenons possession de nos cabines après avoir donné nos noms à un certain Jaioubliésonnom. Cette embarcation est beaucoup plus grande que celle de Nikolaas, et nous ne sommes pas les seuls passagers.
- On établit alors le premier contact avec les spécimens présents.

"Qu'est-ce que vous regardez ? interrogea Pernilla avec une certaine curiosité, en se penchant au bastingage.
- L'eau, fit Zacharias sans bouger d'un poil. Je veux voir les vagues sur le bord du bateau quand celui-ci partira." Le regard rivé sur les flots vaseux du port de Deimos, elle mit quelques secondes à comprendre, du fait de l'incongruité de la réponse. Enfin, l'incongruité... Après tout, chacun ses lubies, hein ? En quoi pouvait-ce bien être plus étrange que n'importe quelle matière académicienne, honorable et utile, dans l'absolu ? Sans parvenir à détacher son regard de la ligne de flottaison, où l'eau salée avait déposé au fil des heures un fin liserai d'écume blanche, elle se fit la réflexion que c'était sans doute parce que l'intérêt que portait Zacharias à cette petite parcelle de réalité en particulier avait quelque chose d'enfantin que sa première pensée avait tenu du mépris amusé. Pour réparer cela, elle se fit un devoir de scruter attentivement les flots avec lui jusqu'à ce que l'ancre soit levée.
Au bout de quelques minutes, deux ou trois personnes les avaient rejoints pour regarder à leur tour, montrant par là l'incommensurable pesanteur de leur badauderie touristique. Deux gamins bruyants s'extasiaient en regardant la faux de Zacharias. Deux ryuan. En fait, il était impossible de déterminer leur âge, mais à en croire l'envie difficile à réprimer qu'avait Pernilla de les jeter par-dessus la rambarde dès qu'ils ouvraient et fermaient leurs cavités, surtout buccales, ils ne devaient pas avoir plus de dix ans. Elle les rabroua d'une voix qu'elle espérait autoritaire, mais ils ne l'écoutaient pas. En fait, ils n'avaient d'yeux que pour le jouet tranchant de l'Ankou. Elle s'éloigna de quelques mètres, un tant soit peu agacée, et se remit à observer, sans plus vraiment savoir pourquoi, le fil blanc qui délimitait la coque de la surface de l'eau. "Qu'est-ce que tu regardes ?" demanda Néro. Elle fit une grimace qu'il ne pouvait pas voir de là où il était. Voilà qu'elle allait passer pour une conne à cause de ce gosse en frusques noires qui regardait la mer. "J'ai vu, heu, une pièce d'or au fond, lâcha-t-elle, se rendant compte en même temps qu'elle le disait que ce n'était que très moyennement crédible, vu que l'eau était au moins aussi propre que l'esprit de Kurt.
- Une pièce d'or ? Tu déconnes ? fit-il d'un air assez étonné en se penchant sur le rebord, avant de froncer les sourcils. T'es sûre ? On n'y voit que dalle.
- Non mais en fait, on ne la voit plus, c'est un passager qui l'a perdue tout à l'heure." Elle fit une pause. "Maintenant, elle doit s'enfoncer dans la vase, voilà tout.
- Tu sais nager ?
- Mouais. Non. Trop mal.
- Moi non plus, mais si on avait une corde, je pourrais descendre." dit Néro en jetant de nouveau un coup d'œil vers les eaux grises. Par un hasard tout à fait étonnant, Pernilla avait justement une dizaine de mètres de corde dans son sac à dos, qu'un aimable employé de l'hôtel Goodrich lui avait fourni pour qu'elle attache solidement (et en faisant plusieurs fois le tour) la turbulente petite tête blonde qui les accompagnait. Après avoir insisté pour qu'elle noue la corde au bastingage, Néro commença à s'harnacher n'importe comment, de manière à être absolument sûr de se se bloquer les voix respiratoires. Elle râla un peu pour la forme et l'attacha au niveau des hanches en serrant beaucoup trop fort, mais bon, y fallait c'qu'y fallait. "Tu voulais t'étouffer, ou quoi ? Déjà, si tu arrives à te noyer, ça sera pas trop mal, si ?
- T'en fais pas, lança-t-il en lui adressant un sourire radieux, je pourrais retenir ma respiration pendant une demi-heure, au moins." Il leva le pouce comme dans un manga, histoire d'achever au canon scié toute tentative d'authenticité comportementale, et se jeta à l'eau. Cela fit un gros bruit humide pas discret du tout. Intérieurement, en regardant avec un sourire rêveur la corde s'enfoncer au milieu des vaguelettes circulaires qui s'élargissaient, Pernilla se dit qu'il faudrait lui demander pendant combien de temps il était capable de retenir sa circulation sanguine. Puis, tout de même, elle frissonna en essayant d'imaginer combien l'eau devait être froide, et se demanda si Zacharias avait vu la scène, et s'il s'en servirait à nouveau pour la rembarrer, elle et ses discours sur la camaraderie. Elle se tourna vers lui. Il était toujours courbé au-dessus de l'eau, mais rien ne permettait d'affirmer qu'il n'avait pas tout entendu. "Hé, vous ! fit une voix. Qu'est-ce que vous faites ?" C'était un marin. "Hé bien, répondit-elle en essayant d'avoir l'air de croire à ce qu'elle disait, j'hydrate mes poissons rouges. Si l'on n'immerge pas régulièrement l'aquarium dans l'eau de mer, ils dépérissent, vous savez ?
- J'ai pas trouvé la pièce ! cria soudain Néro depuis l'eau. T'es bien sûre que c'est là qu'elle est tombée ?
- Des poissons rouges..." murmura le marin en la regardant d'un air navré, à mi-chemin entre l'exaspération et l'incrédulité, avant d'aller tirer sur la corde pour remonter Néro. Elle jeta un coup d'œil vers la ville. Deimos était à quelques brasses encore, et dans une heure ou deux, elle disparaîtrait à l'horizon. Le voyage allait être long...
Soudain, comme pour lui donner raison, le bateau s'ébranla et le bruit métallique de l'ancre qu'on extirpait des flots résonna d'un bout à l'autre du pont. C'était le moment du départ.

Suite immédiatement disponible.

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